"Dans la famille des automobilistes fous je voudrai : le frôleur, le klaxonneur, l'alcoolisé et l'anarchiste. Trêve de plaisanterie. Automobiliste, par prière, lorsque vous voyez un cycliste, chargé ou non, ralentissez"


Ce matin je me lève à 6h00. Il fait encore nuit mais il n'y a pas une once d'humidité : les équipements ne sont pas trempés. J'ai bien dormi sauf que j'ai été réveillé à 23h30 par un vigile qui faisait une ronde dans le parc : son chien de garde qui grognait méchamment m'a vraiment fait peur. J'ai cru pendant un instant que c'était une personne mal intentionnée. J'ai été soulagé lorsqu'il m'a confirmé qu'il est en charge de surveiller le coin parfois animé de jeunes l'été. Heureusement pour moi, c'est la rentrée et personne ne rôdait dans les parages : ouf ! J'entame alors mon huitième jour de vélo d'affilée et prends mon petit-déjeuner dans l'obscurité. Je m'éclaire comme je peux avec mon portable et pense déjà investir dans un lampe plus pratique, qui se fixera au plafond de la tente. Je range les sacoches et suis fin prêt à 7h30 pour partir en direction de Nantes.

D'entrée, le vent montre qu'il est bien réveillé et souffle fort plein Nord. Je remonte au niveau du Pont de St Nazaire et aperçois un premier automobiliste devant moi qui sort de son emplacement de parking. Il cale deux fois d'affilée avant que je le dépasse : je trouve ça louche. Il me double alors à pleine vitesse et klaxonne un monsieur sur le trottoir d'en face avant de lui faire un doigt d'honneur : il est complètement barré celui-là ! Au vu de sa conduite, il doit certainement être encore soûl de la veille. Cependant, cela n'excuse en rien le fait de commettre de pareils incivilités. La journée commence bizarrement : j'espère que ça ne durera pas. Je continue jusqu'à la voie indiquée par mon guide et ne distingue aucun panneaux d'indications : une fois de plus, c'est bizarre. Je me dis qu'ils seront forcément plus loin et continue mon chemin. Je roule environ dix minutes et ne vois toujours rien. Je suis des panneaux qui indiquent "centre-ville". Ça me met la puce à l'oreille : ne serai-je pas en train de revenir à St Brevin les Pins ? J'allume le GPS et constate que je suis effectivement au point de départ : voici huit km et vingt minutes de perdus. Je suis consterné. En fait, je me rends compte que la voie indiquée par mon guide est inexistante. Je pouvais bien rouler des heures durant que je ne serai jamais arrivé à bon port. Avec l'aide du GPS je file vers Paimbœuf pour rattraper le temps perdu. Je traverse des routes de campagne où champs et cultures s'enchaînent. Je trouve le premier panneau seulement au bout d'une heure de vélo : c'est pas trop tôt. Je m'arrête alors à Paimbœuf et prends un grand café avec un croissant pour me restaurer. Il fait assez frais et j'ai la goutte au nez.

Je repars et enfile directement mon t-shirt près du corps : le vent est froid dans cette zone. J'arrive ensuite dans un rond point que la voiture d'en face prend à l'envers : décidément c'est de pire en pire. Après quelques routes de campagne à l'abri du vent, j'emprunte le canal de la Martinière. Me voila parti pour quinze km de ligne droite. Au début je roule convenablement malgré le vent de face. Petit à petit, je m'épuise non pas à cause du vent mais du revêtement de la piste. C'est pourtant une route goudronnée mais cette dernière est jonchée de mini bosses absorbant le moindre de mes coups de pédale. J'ai donc l'impression de pédaler dans la semoule. Je dois redoubler d'effort pour avancer à bonne allure. Le pire dans tout ça est que les sautillements du vélo provoqués par les bosses me font mal aux fesses. Et encore, je suis très peu chargé à l'avant car mes sacoches ne contiennent quasiment plus aucune nourriture. J'ai de plus en plus hâte de finir cette maudite route. Je fais une petite pause pour me soulager et repars. Il y a toujours autant de vent et le soleil à vraiment de la peine à se montrer aujourd'hui. À 11h, je termine enfin le canal et distingue de grands espaces aménagés. Je m'y arrête directement pour manger et me reposer. Le temps se couvre et quelques gouttes de pluie tombent. Je fais quand même une super sieste et écris un long moment.

Je repars bien reposé et arrive au village de Pellerin où une embarcation gratuite est disponible pour traverser le bac. Ça ne m'intéresse pas étant donné que je vais à Nantes : je continue ma route. La suite du tracé me réserve de belles surprises ! Pour commencer, je traverse St Jean de Boiseau et doit peiner dans plusieurs montées à 8 %. Mes jambes sont en forme après la pause déjeuner et ont le répondant nécessaire pour grimper. De grandes descentes s'enchaînent sur une piste en gravier : c'est dangereux et je ralentis. Je commence à avoir beaucoup de mal à correctement suivre l'itinéraire de mon guide. Certains carrefours ne sont pas balisés dans mon sens. Je dois donc faire des suppositions par rapport au panneau en sens inverse pour déduire la bonne route à suivre : j'ai l'impression d'être en pleine partie d'échec. Maintenant j'en suis certain, la piste veut tester mes capacités de réflexion. Je perds du temps à chaque fois en rallumant le GPS pour décider du nouveau cap à suivre. Une automobiliste pressée manque de me faire tomber en me frôlant lors de son dépassement, non signalé par son clignotant (évidemment). Je lui fais des signes mais elle continue sa route. J'atteins ensuite le village de Montagne (je n'invente pas c'est son vrai nom) et dois enchaîner des côtes à 10 %. Je grimpe les deux premières et lorsque la troisième se pointe je ricane fortement en mettant pied-à-terre : c'est quoi ce tracé de malade ! Si j'avais voulu faire de la montagne, je serai directement allé dans les Alpes. Je passe cette zone difficile et débarque sur un chemin plat (oui il y en a eu parfois). Un espèce d'abruti de conducteur (pour rester poli) me klaxonne pour m'indiquer sa présence. C'est gentil de sa part sauf que ça me fait sursauter et je manque de tomber : c'est sur, ils sont tous fous aujourd'hui. Je repars et après avoir établi de multiples hypothèses sur la direction de la piste et arrive enfin au bord de la Loire : quelle après-midi compliquée.

Je bois un cappuccino en terrasse pour décompresser. Heureusement que demain je ne roule pas car je pourrai ainsi me reposer. J'entame la dernière ligne droite dans Nantes au milieu des piétons et des voitures. Après sept éprouvant km en ville, je suis devant la porte de mon ami Dylan. Cet ancien collègue de promotion accepte très gentiment de m'héberger. Je suis content de le revoir. Il vit dans une grande maison en collocation avec d'autre jeunes, à l'écart des bruits de la ville. C'est agréable de se retrouver dans cet environnement et sens que je vais bien me plaire ici. Nous discutons un moment puis je prends une très bonne douche. Nous allons ensuite manger un burger à une bonne adresse accompagné d'un vin rouge. Le repas se déroule tranquillement et nous parlons un peu de tout : le vélo, le travail, les projets futurs et les anciens collègues de promotion. Pour finir en beauté, nous buvons une excellente pinte dans un pub irlandais au cœur de Nantes. La fatigue nous tient tous les deux et nous rentrons dormir. Ce fut encore une sacrée journée.

Demain et après demain, c'est repos. Je prévois des activités très tranquilles. J'ai pas mal d'idées en tête pour la suite du voyage et dois surtout penser à m'équiper en affaires chaudes pour passer l'automne sans soucis.