"Je roule maintenant depuis plus de deux mois et sens quelques changements opérés en moi, dont les capacités physiques développées au fil des dénivelés"


Je suis debout à 6h30 ce matin. J'ai super bien dormi sur cet emplacement très au calme. Il fait encore nuit lorsque je me lève faire ma toilette, cette fois à l'eau froide, ce qui me permet d'admirer les loupiottes des éoliennes qui clignotent dans l'obscurité. Je me prépare ensuite le meilleur des petits-déjeuners avec aujourd'hui le grand retour du chocolat chaud accompagné de flocons d'avoines. Je savoure pendant quelques instants ma mixture avant de replier les affaires. Il a plu dans la nuit et la tente humide m'indique que je devrai d'ores et déjà la faire sécher ce soir. Le vent s'est enfin calmé et seule une légère brise souffle. C'est une excellente nouvelle car j'économiserai ainsi de précieuses forces pour avancer. Je fais un petit saut au cimetière, amen, pour recharger mon eau puis quitte le pays du vent dans la foulée.

Je redescends rapidement sur le Tréport et entame le premier gros obstacle de l'étape : je monte sur le flanc de colline opposé. Je dois pousser le vélo et mouliner très fort pour franchir cette difficulté. Mes efforts payent car une fois au sommet j'ai le droit à un magnifique panorama sur les environs : je prends plusieurs photos. La piste coupe ensuite entre les monts via des longues côtes entre 5 et 7 %. Heureusement le reste est plat et je file au milieu des plaines vertes à 30 km/h. Je passe par les villages de Friaucourt et Woignarue avant de débouler sur un sentier en cailloux et en terre. Mon vélo tremble de partout ce qui me rappelle ce bon vieux canal du Midi et sa piste d'enfer. Je modère ma vitesse pour ménager mes sacoches mais surtout mes fesses. Un peu plus loin sur le chemin je fais face à une nouvelle difficulté : l'eau omniprésente submerge partiellement la voie sur 2 km. Je dois donc zigzaguer doucement entre les flaques pour ne pas m'embourber. C'est un exercice assez physique car à faible allure les bras prennent le relais sur les jambes afin de maintenir la direction. Au bout de 20 minutes je termine cette éprouvante partie et déboule à l'entrée d'une voie goudronnée. Cette dernière m'emmène sans problème jusqu'à Cayeux sur Mer. J'y entre par sa grande plage de galets sur laquelle de petites cabanes en bois sont disposées à égale distance les unes des autres.

La Manche est calme et c'est reposant de l'observer quelques instants. Je file ensuite au centre dans le but de me reposer après ces presque 30 km ce matin. Pour une fois je ne m'installe pas en terrasse car j'ai les pieds gelés : les chaussettes que je porte sont trop fines. Je rentre donc au chaud dans le bar écrire les aventures devant un bon café. Je prévois de manger à la pointe de l'étape à Hourdel et reprends ma route à 11h15. Je quitte les lieux en roulant sur une longue ligne droite qui m'emmène aux portes d'une magnifique voie en site propre bordée de dunes et de petits arbustes. Je m'enfonce alors dans la sauvage baie de Somme. Je repère tout de suite ses multiples oiseaux qui errent sur les bord calmes de la Manche. Sur la rive d'en face j'aperçois le village du Crotoy que je dois atteindre aujourd'hui. Les nombreux marcheurs profitent de cette douce matinée pour s'aérer l'esprit tandis que je passe avec mon vélo. Certains endroits légèrement ensablés me font descendre de ma monture. Finalement, j'atteins calmement le bourg du Hourdel où j'ai là aussi une très belle vue sur la mer à marée basse. Je m'installe sur un banc au soleil et mange mon repas. J'ai en même temps mon ami Gill Christ au téléphone et je suis content d'avoir de ses nouvelles. Nous échangeons durant une quinzaine de minutes et je repars vite à cause du vent froid.

Je débute alors le tour du bassin de la baie de Somme via une grande voie cyclable. La parcourir n'est pas très agréable étant donné qu'elle est jonchée de racines faisant sauter mes sacoches à tout-va. Le vent a rameuté beaucoup de débris qui rendent certaines portions compliquées. À un moment une branche vient se coincer dans ma chaîne et je m'arrête immédiatement pour l'enlever. J'ai de la chance puisqu'elle ne commet pas de dégâts et je suis prudent pour la suite. Le tracé me fait passer à l'entrée de Noyelles sur Mer avant de continuer jusqu'au Crotoy. J'atteins assez vite ma destination du jour en filant à 30 km/h avec le vent de dos et termine à seulement 13h30 mon étape. J'ai donc le temps d'admirer les jolies ruelles du centre avant de me diriger à l'office du tourisme. Je demande la carte vélo de la Somme puis déguste 2 superbes gaufres en terrasse pour fêter les 60 km du jour. Je ne traîne pas plus longtemps au Crotoy et repars à 14h40 direction Favières. Ce village, à l'écart des grands axes, me semble être idéal pour passer une nuit au calme. Je m'y rends immédiatement et fait d'abord le tour de toutes les propriétés : il n'y a rien d'incroyable. Ma carte indique une aire de pique-nique qui n'est manifestement plus en service.

Je suis prêt à partir mais vais quand même voir le coin vers l'église. Il y a un vaste parking et une petite allée bordée de haies et d'arbres idéale pour une tente. Je fais sécher les équipements pendant une heure, constate qu'il y a très peu de passage et monte le camp. Ça devrait normalement aller au vu de la tranquillité des lieux. J'écris en mangeant quelques gâteaux puis me douche au soleil. Je me prépare ensuite un bon repas à base de tomate, quinoa et fromage. J'exerce mon divin rituel avant de me coucher. La nuit va être bonne, je le sens.

Demain, je passerai normalement le Touquet Paris Plage et ne serai plus qu'à un jour de terminer ma route sur la Vélomaritime :)