"Ajoutez une pincée de plat, de très vastes campagnes et beaucoup de montées, pour réussir votre fusion entre les pistes normande et bretonne : vous obtiendrez ainsi une superbe piste nor-tonne"


Ce matin, je me réveille un peu en avance à 6h25. Je veux être prêt le plus tôt possible pour bien démarrer la grosse journée de vélo qui m'attend : j'ai prévu une étape d'environ 70 km direction plein Nord. Je sors de la tente pour faire une petite toilette et me rends compte que je suis encerclé : ce matin c'est "limace contre-attaque" ! Elles s'accumulent toutes à l'abri sous le auvent et pour une raison inconnue, elles sont attirées par mes éponges qui sèchent. Je leur donne de gentilles pichenettes pour leur faire comprendre que ce lieu est ma maison. Il a un peu plu dans la nuit et la tente est très légèrement mouillée. Je bois mon café puis replie rapidement les sacoches. À 8h05, je suis presque prêt à partir. Échauffements, étirements, ravitaillement en eau et me voilà sur la piste pour de nouvelles aventures en direction de Vire Normandie.

Ce début d'étape est assez physique car je commence par 15 km de faux plat montant. Ça me rappelle fortement la journée d'hier et je mouline calmement pour ne pas m'épuiser. J'avance au milieu des bois sans croiser le moindre chat. Seuls quelques écureuils sauvages font leur gymnastique du matin au bord du chemin. Le soleil fait son apparition et je change de paire de lunettes pour recouvrer la vue. La forêt est calme et elle longe les champs de vaches et de cultures. Plus je roule et plus la piste m'en rappelle une autre. Après réflexion, je la trouve similaire à celle reliant Carhaix à Morlaix. J'en conclus simplement qu'il s'agit d'une ancienne voie de chemin de fer transformée en voie verte. Les maisons que je croise, disposées à intervalles réguliers et faisant office de gares, me le confirment. C'est donc pour cela que le tracé est si monotone. Heureusement, mon installation musique m'aide à me changer les idées quand j'en ai marre. Plus d'une heure après mon départ, j'atteins enfin la partie descendante et file à 30 km/h au milieu des bois. Les noix et les feuilles craquellent sous mes roues sifflant au vent. Quel plaisir d'avancer si vite ! J'arrive donc rapidement à Vire Normandie et cherche un bar pour me restaurer. Après quelques minutes, je trouve une boulangerie qui fait aussi des cafés. C'est parfait et je m'installe au chaud devant ma boisson fétiche avec un pain au chocolat. Je me plonge ensuite dans le récit de la veille quand un grain tombe subitement dehors : je suis content d'être à l'abri. Je reste environ une heure et repars bien reposé pour la deuxième partie de la matinée, en direction de Souleuvre en Bocage.

Je repique directement sur la voie verte, cette fois plate, et avance à bonne allure. Au niveau du village de la Graverie, la piste devient goudronnée et la chaussée est humide : je roule prudemment. La pluie ne tombe pas encore trop fort et je continue mon chemin en entamant une grosse descente. Ça remonte aussi sec derrière ce qui m'oblige à mouliner pour avancer. Quelques minutes après le grain tombe. C'est le moment, pour la première fois du voyage, de revêtir ma cape de pluie. Cette dernière se révèle est efficace car je ne suis que très peu mouillé. J'arrive enfin au grand viaduc de la Souleuvre et termine une matinée de 53 km de vélo. Par chance je trouve un endroit abrité pour manger et me reposer. Tranquillement, je vaque à mes occupations et écris les aventures. La pluie se calme momentanément lorsque je m'apprête à repartir en direction de Pont Farcy. Fausse bonne nouvelle car elle se remet à tomber à l'instant où j'enfourche le vélo : je renfile rapidement ma cape. Je remonte ensuite ce que j'ai descendu en arrivant par l'intermédiaire d'une côte à 15 % dans laquelle je pousse mon vélo. Le guide m'avait prévenu de ces difficultés et je suis prêt mentalement à affronter le mélange de piste normande et bretonne. Arrivé en haut la pluie s'arrête et je retire ma cape avant de poursuivre ma route. Sans surprise, je déboule au beau milieu des fameuses montagnes russes du secteur.

Le dénivelé du terrain est assez hallucinant : en même pas 500 mètres je descends à plus de 10 % et remonte aussi fort. Je fais les premières montées sur le vélo puis le pousse le reste du temps. C'est extrêmement physique et de nouveau, mon corps est mis à l'épreuve cette après-midi. La pluie tombe un peu au compte-gouttes et me mouille seulement de temps à autre. Les petits villages se succèdent avec comme point d'intérêt leurs clochers tous très anciens. Je passe promptement devant chacun d'eux et n'ai pas la patience de m'arrêter pour les contempler davantage. J'ai déjà 65 km dans les jambes et tant qu'il ne pleut pas trop, j'avance le plus possible. À 15h15, j'en finis avec la piste "nor-tonne" et tombe instantanément sur un super coin pour camper le long de la Vire : trop cool ! Je monte quand même au village pour me doucher au toilette publique puis reviens au bord de l'eau. J'ai juste le temps de faire sécher les affaires avant que plusieurs minuscules averses tombent de manières complètement aléatoire. Je monte le camp et me mets à l'abri dans la tente. Je publie ensuite l'article de la veille en savourant un petit apéro après cette grosse journée de vélo. La bière est bonne et je prépare de succulentes penne à la bolognaise avec un bouillon saveur pot-au-feu : je suis calé pour la soirée. Je termine le repas quand il fait nuit et enchaîne par mon saint rituel. Pour finir, je rentre vite au chaud dans mon duvet et sens que je vais bien dormir.

Demain, j'atteindrai Carentan et ne serai plus très loin des fameuses plages du débarquement :)